Communiqué intersyndicale

Enseignement Agricole Public : un Ministre qui aurait déjà renoncé ?

L’intersyndicale de l’EAP (FSU-CGT-FO-SUD), qui avait appelé le 24-11 à faire porter la voix des personnels de l’EAP dans l’ensemble des régions, a été reçue ce 09-12 par le Cabinet du Ministre (Annick Baille Conseillère à l’EA), en présence de la DGER (Philippe Schnäbele, adjoint à la DGER). 6 régions étaient représentées. La tonalité générale de l’échange sur l’ensemble des points abordés par la délégation, c’est que les discours et autres postures ont du mal à résister face aux retours du terrain… sauf à ne pas vouloir les entendre ou à ne pas être en capacité d’y répondre faute de moyens suffisants… D’un budget et d’une rentrée à l’autre : une Conseillère du Ministre et une DGER qui campent tant bien que mal sur leurs fragiles positions.

Interpellation de l’Intersyndicale

Nous insistons sur des dotations insuffisantes, les élèves nombreux refusés à l’inscription, une tendance importante au surbooking et des dédoublements non assurés (notamment en Langues vivantes), des options non financées, aucune nouvelle ouverture de classes de prévues dans au moins la moitié des régions (en dépit des priorités retenues dans le cadre des cartes des formations professionnelles).

Nous redemandons que l’engagement du Ministre sur la conduite d’un diagnostic partagé région par région sur les évolutions en matière d’effectifs pour les deux années à venir, sur fond de hausse démographique, avec les organisations syndicales représentatives des personnels se traduisent au plus tard d’ici février 2016.

Réponse du Ministère – façon « passez votre chemin » – verbatim

« Nous aurons créé 1000 postes dans l’EA durant le quinquennat et cela aura permis de revenir au nombre d’emploi de 2009…», « la DGH augmente chaque année », « peut-être ça et là, dans tel ou tel établissement, y a-t-il des points de blocage à regarder… », « + 20 000 heures de DGH à la rentrée prochaine, mais dont l’essentiel sera consacré à assumer les « coups partis » – autrement dit le déploiement d’un cycle complet après avoir ouvert une première année – et des ajustements en gestion de plafonds de recrutements ». « Un CTEA ou un groupe de travail s’y rattachant sera bien réuni autour d’une expertise sur les évolutions en cours dans le courant du premier trimestre 2016 ». « Par contre, si il sera bien question des hausses démographiques, il faudra également tirer des conséquences sur les baisses » !

Commentaire général de l’Intersyndicale

La réalité est hélas assurément encore plus crue, la DGER n’étant même pas en capacité d’arbitrer les ouvertures de classes à enjeux particulier (point initialement à l’ordre du jour du CTEA du 12 novembre et non reprogrammé en décembre). Ça coince à tel point que la DGER est en réalité en train de réduire les ouvertures de postes aux concours externes pour essayer d’abonder les moyens de fonctionnement des établissements (y compris par un recours excessif et sans transparence aux heures supplémentaires)… Sur les 20 000 heures de DGH supplémentaires, le Cabinet en a concédé 4000 à la région Pays de Loire… là où le DRAAF-SRFD estime le besoin à près de 10 000 heures pour simplement avoir les moyens de garantir une poursuite d’études aux jeunes déjà inscrits et essayer de maintenir les capacités d’accueil à l’identique, capacités pourtant déjà notoirement insuffisantes ! L’Intersyndicale demande le redéploiement des moyens visant à doter les structures des établissements du privé, en cas de fermeture en particulier, vers ceux du public.

Dotation en personnels, formation continue, réforme territoriale, voie professionnelle : quelques engagements pris, mais sous bénéfice d’inventaire…

Interpellation de l’Intersyndicale : concernant les dotations en personnels

Nous revenons sur les tensions qui pèsent sur le quotidien de travail de trop nombreux personnels administratifs, techniciens et de santé, dont les services sont sous-dotés dans beaucoup d’établissements et sur les moyens en postes, au-delà de la parution à venir des notes de service « dotation ATLS » et « dotation vie scolaire », qui permettraient réellement d’infléchir, corriger, améliorer des situations qui pour
certaines conduisent à une véritable souffrance au travail. Les difficultés existent aussi au niveau des Assistants d’Éducation (dotations à ré-évaluer, financement non budgété dans sa complétude…).

Réponse du Ministère

« Un certain nombre de postes d’infirmière seront effectivement créés, sans certitude à cette heure sur leur nombre… ».« Pour les postes d’administratifs, le seul levier qui a pu jusque là être actionné est celui de la déprécarisation (avec des quotités passées de 70 à 100% ce qui a permis de gagner quelques dizaines d’équivalent temps plein… et une vingtaine d’agents sur budget titularisée sur site). Pour la suite,
pas de perspective de création de postes à court terme ». « La parution de la note de service « dotation ATLS » légitimera des demandes de soutien à des équipes reconnues objectivement comme sous-dotées, mais les capacités de réponse seront de fait limitées ».

Interpellation de l’Intersyndicale : concernant la formation continue des agents

Nous pointons le déficit qui persiste en matière d’offre de formation continue, en particulier pour les agents de catégorie B et C, ou encore des carences sur la question particulière mais très sensible des valeurs de la République, et plus généralement sur le plan disciplinaire et didactique pour les enseignants (Plan National de Formation 2016 très limité disciplinairement, comme sur l’appui au décrochage scolaire en 4ème et 3ème et en filières professionnelles). La situation particulière des AVSI de l’Enseignement agricole est également dénoncée, ceux-ci ne bénéficiant pas plus de la formation continue, en vue de leur professionnalisation, que de perspectives de CDI, sur fond d’inéquité de traitement manifeste d’une région à l’autre.

Réponse du Ministère

« Il reste sans doute beaucoup à faire, mais la formation continue des agents fait clairement partie des priorités du Ministère ». « Le principe de réunir un groupe de travail sur les AVSI et le suivi du handicap est acté ».

Interpellation de l’Intersyndicale : concernant la réforme territoriale et les suites des Régionales

Nous demandons la mise en place de deux groupes de travail dès janvier, l’un sur le fonctionnement des instances, et l’autre sur la méthode et les stratégies dans les grandes régions (carte des formation, politique au niveau des CFA, comme des CFPPA, dotations ou non des exploitations,…) – en lien avec le 6ème schéma des formations qui pour l’instant n’avance pas. Nous avons par ailleurs tenu à insister, dans le contexte du renouvellement des Exécutifs régionaux, sur la nécessité pour la DGER et le Cabinet de porter les spécificités de nos EPLEFPA auprès des élus des conseils régionaux dans leur nouvelle configuration : problèmes
dans un certain nombre de régions de dotations insuffisantes, de remplacements mal assurés, question de l’harmonisation entre régions fusionnées sur le transport pédagogique et les agents chauffeurs de bus…

Réponse du Ministère

« Nous actons la mise en place dès le début 2016 d’un groupe de travail DGER-SRH sur les conditions de réunion des instances dans les nouvelles régions, sachant qu’une circulaire spécifique sur les CREA est en cours de rédaction ». « Des rencontres sont prévues avec l’Association des Régions de France pour aborder ces questions d’harmonisation de pratiques ».

Interpellation de l’Intersyndicale : concernant la voie professionnelle

6 ans après la mise en place de la réforme de la voie professionnelle, les remédiations et correctifs nécessaires font toujours défaut… Pire, la tendance est même à la dégradation : renonciation du Ministère à redéployer – même de façon expérimentale – des possibilités de parcours 4 ans pour les élèves qui en ont le plus besoin ; baisse continue des volumes d’HSE (toujours aucun bilan chiffré, pas de réponse sur la sécurisation financière du dispositif d’expérimentation), aucun moyen dédié pour le soutien des étudiants de BTSA issus d’un bac pro 3 ans (priorité pourtant retenue dans le Plan stratégique de la DGER). Par ailleurs, l’Intersyndicale a redit avec force son opposition à ce que la responsabilité pénale des enseignants soit engagée dans le cadre des conventions de stage, seule la signature de l’annexe pédagogique étant acceptable.

Réponse du Ministère

« Du retard a été pris, mais l’objectif de révision des dispositifs d’individualisation sera tenu ». « La lettre de mission du CGAER sera transmise à chacune des organisations qui ne tarderont pas à être auditionnées, sachant que la remise du rapport est prévue pour mars ». « Pour l’instant, la DGER n’a pas été associée aux chantiers ouverts par l’Éducation Nationale sur la voie professionnelle. Contact sera
pris par le Cabinet en ce sens ». « Concernant les conventions de stage, l’Administration a tenu à redire que maintenir la signature de l’enseignant référent sur l’ensemble de la convention était une obligation réglementaire, mais elle propose d’assortir cette signature d’une référence au Code de l’Éducation qui circonscrit la responsabilité de l’enseignant au suivi pédagogique du stagiaire. Elle a par ailleurs
donnée une suite favorable à notre demande d’expertise de cette nouvelle proposition par le Service des Affaires Juridiques du ministère ».

Commentaire général de l’Intersyndicale

Les quelques engagements pris sont très en deçà de ce que l’Enseignement Agricole Public, ses agents comme ses usagers sont en droit d’attendre, que ce soit au niveau des services sous-dotés ou d’un investissement dans la formation continue qui peine à se concrétiser (et le peu de conviction mis jusque là dans l’accompagnement du plan national de défense des valeurs de la République en est hélas une bonne illustration). Par ailleurs, la volonté politique de remédier aux difficultés des jeunes continue de faire clairement défaut… et en dépit de l’engagement de revoir à court terme les dispositifs d’individualisation actuels et de la remise à moyen terme du rapport commandé par le Ministre sous la pression de nos organisations, aucun signe n’est envoyé pouvant laisser à penser que les lignes vont bouger, alors même que les taux d’échec au bac pro 3 ans demeurent importants et les interruptions en cours de formation inquiétantes.
Les Personnels ne renonceront pas à ce que leur expertise soit entendue et que la priorité soit redonner aux élèves de la voie professionnelle.

Paris, le 15 décembre 2015